Comme quoi, quand on s’en
donne les moyens : on peut sortir du Ghetto de Gaza !
par Israel Shamir
26 janvier 2008
traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier

Ils sont sortis ! Ils ont risqué
leur vie, ils ont débordé l’armée, ils ont renversé
la barrière, ils ont marché sur les fils de fer
barbelés, ils ont éliminé la frontière entre deux
Etats. Ils ont posé tant et tant d’actes héroïques,
dignes de grands guerriers, enregistrant des pertes.
Et, une fois dehors ? Eh bien, une fois dehors, ils
sont allés faire des courses : du pain, pour leurs
enfants ! Voilà qui a démoli ce poncif des
Palestiniens, que les juifs avaient essayé
d’enfoncer dans la conscience du monde : le poncif
de fanatiques violents, avides de pillage. Bien au
contraire : les gars ont cassé les portes de leur
prison, et ils sont tranquillement allés acheter
leur pain… La raison ? Leurs seigneurs juifs les
maintenaient le ventre vide : il faudra sans doute
attendre longtemps pour revoir, venant du
Moyen-Orient, une image plus puissante que
celle-ci : des pères de famille ramenant du pain à
la maison…
Ils sont tellement normaux, ces habitants de
Gaza : comme vous et moi, ils mènent leur petit bonhomme de
vie ; ils bossent, qui dans une banque, qui dans un garage… Mais
ils reçoivent de plein fouet des mauvais traitements moyenâgeux.
Tout d’abord, on les déposséda, et on les cornaqua vers Gaza.
Puis ils furent traités comme des chiens ne devraient pas
l’être ; il leur fut interdit d’utiliser une autoroute dès lors
qu’elle est utilisée par un seul juif, on leur interdisait de
voir leurs proches, qui ne vivaient pourtant qu’à quelques
kilomètres de là. Et puis, il y eut ce siège : pas de
nourriture, rien à donner aux enfants. Pas d’avenir, non plus,
tant qu’ils auraient Israël pour voisin. Ils souffrent, pour un
seul et unique crime : ils ne sont pas juifs, bien que beaucoup
d’entre eux – ironie de l’Histoire – soient des descendants de
juifs, certains parmi eux portant des noms de familles juives
célèbres ayant adopté le christianisme ou l’Islam.
Ils étaient supposés souffrir en silence ; mais
les Gaziotes ont beaucoup de dignité. Ils ont voté pour le
Hamas, contre la volonté d’Israël et de l’Amérique, et ils ont
chassé le gang des collaborateurs, les hommes de main de Dahlan.
Voilà qu’ils viennent d’abattre la barrière, et ce fut là un
excellent exemple, pour nous tous : rien ne sera possible, tant
que nous resterons à l’intérieur des frontières édictées par nos
ennemis. Une poussée, en effet, est indispensable : cela
s’appelle la Révolution.
Quand les Gaziotes commencèrent à revenir à
Gaza, chargés de leur butin réjouissant – du pain, du riz, du
sel, des couvertures, des légumes, des moutons – les juifs
faisaient assurément la tronche. Mais, bordel : ces indigènes
vont finir par oublier que nous sommes, pour eux, à l’égal de
Dieu : c’est nous qui prodiguons et qui sanctionnons, c’est nous
qui nourrissons et qui affamons !?! Mais voilà qu’au lieu
d’accepter notre damnation, ils ont pris leur sort entre leurs
mains !?! Avec le pain et le riz, les Gaziotes vont introduire
en contrebande des flingues, et cela risque de nous contraindre
à remettre à plus tard la grande offensive d’ores et déjà
validée par George Deubeuliou ! En effet, il faut bien le dire :
nous, les juifs, nous préférons nettement agresser des victimes
désarmées…
Et voilà-t-y pas que les Egyptiens, eux aussi,
s’y mettent, et déçoivent leurs « amis » juifs ! « Je pense que
l’Egypte sait très bien ce qu’elle a à faire », a dit, toujours
aussi arrogant, le général israélien Ehud Barak. Le boulot qu’il
avait donné aux Egyptiens, c’était gardiens de prison de leurs
frères palestiniens. « Les Gaziotes n’oseront jamais briser le
siège pour passer au Sinaï », écrivaient les pontifes
israéliens, voici de cela une semaine – hier, encore – les
Egyptiens les accueilleraient avec des tirs mortels ». Quand il
y eut effectivement des tirs, en l’air, les Israéliens furent
fous de joie. Mais cela ne dura pas. Effi Eitam, un dirigeant
juif intégriste de droite, ressemblant à un « cochon cachère
bien nourri en yarmulke » (pour reprendre la description que
fait de lui Gilad Atzmon), a écrit une tribune, dans le
quotidien Yediot Ahronot, dégoulinant de larmes de crocodile.
Nous, les juifs, nous sommes tellement doux, tellement
miséricordieux, comparés aux Egyptiens, écrivait-il. Seulement,
voilà le hic : Moubarak veut survivre politiquement, et il sait
qu’il est des limites qu’il ne doit pas trop dépasser. Aussi
a-t-il donné à ses militaires l’ordre de cesser le feu. Les
juifs geignirent que les Egyptiens doivent faire respecter leur
frontière, et fournir leur livre de chair, conformément aux
accords conclus. En vain : Moubarak ne tient pas
particulièrement à suivre Anwar as-Sadate en Enfer.
Alors, ulcérés, les juifs regardèrent cette
foule, sortant de sa prison pour une brève permission. Mais
qu’est-ce qu’il leur faut ? Jamais contents, ces juifs !?! Il
faudrait que les Palestiniens s’entretuent et s’adonnent à la
guerre civile, ou meurent de faim : voilà qui, pour le coup,
leur ferait vraiment plaisir…
Mon grand-père l’a fait : il est mort de faim et
d’épuisement, en 1942, dans le ghetto de Stanislaw. Les
Allemands et leurs Quisling ukrainiens ont fait aux juifs ce que
les juifs ont fait aux Gaziotes : ils les ont rassemblés dans le
ghetto, et ils les y ont fait mourir de faim. Les slogans des
nazis étaient du même tonneau que ceux d’Homerton-Barak, mutatis
mutandis : « ils doivent souffrir, parce que leurs dirigeants
sont nos ennemis ; ils doivent être punis, en raison de leur
terrorisme, quand ils font la révolution, qu’ils crèvent de
faim, puisque leurs frères harcèlent les troupes allemandes et
bombardent les villes d’Allemagne ! » Mon grand-père Israel –
c’est de lui que je tiens mon prénom – succomba à la faim, au
froid et à l’épuisement, ils n’ont même pas eu à le fusiller ;
il n’était pas éligible à leur programme de tueries ciblées.
Attendez une minute, allez-vous protester.
Comment Barak et Olmert, affamant les Gaziotes, en 2008,
auraient-ils bien pu influencer les Allemands de 1942 ? Comment
pourraient-ils être responsables de la mort de mon papy ? La
réponse se trouve dans le langage secret du mysticisme juif :
‘Ein Mukdam, ein meuhar beTorah’ [« Dans la Loi, il n’y a ni
avant, ni après » (libre traduction du traducteur, à partir de
l’hébreu, qu’il ne connaît pas, mais qu’il devine…), ndt]. La
séquences des événements historiques – dans les Saintes
Ecritures, comme en ce bas-monde – ne tient pas, car tous les
événements, et leurs conséquences alléguées, se produisent dans
le même hyper-temps, rejouant à jamais les cercles vicieux du
chat-poursuivant-les-souris-qui-effrayèrent-l’éléphant-qui-écrasa-le-chat.
Poincaré et Einstein ont traduit ce concept dans le langage de
la physique moderne, décrivant le Temps comme l’une des
dimensions, parmi d’autres – aussi déformable que toutes les
autres…
Douglas Adams a popularisé cela, dans son
roman : ses personnages retournent dans le passé pour y régler
un problème. Ils y parviennent, mais il y a un prix à payer :
ils sauvent un poisson, mais le dodo de l’île Maurice
disparaît ; ils y gagnent la musique de Bach, mais ils y perdent
les poèmes de Coleridge… Seuls ceux qui ont pu s’extraire du
cadre des temps le savent : le monde change tout le temps, à
cause de nos actes, et ces changements s’opèrent « vers le
passé » et « vers l’avenir », parce que le « passé » et
l’ « avenir », cela n’existe pas ! Ainsi, les Arméniens
égorgèrent et expulsèrent les Azéris, et leurs ancêtres furent
déportés dans le désert où ils furent martyrisés par les Kurdes,
et les Kurdes souffrent en raison de ce crime, mais aussi en
raison de leur soutien à l’occupation américano-sioniste.
Et puis il y a des choses qui ne se sont pas
encore matérialisées, mais qui vont le faire : quand j’entends
les juifs (et les Polonais, et les Ukrainiens, et les
Américains) insistant à dire que « Staline était aussi mauvais
qu’Hitler », et qu’ « il n’y a aucune différence entre les nazis
et les cocos », à parler de l’ « antisémitisme russe », je sais
que dans un futur proche, l’Armée Rouge ne combattra pas les
Allemands, ne libèrera pas la Pologne, ni la Tchéquie, et
qu’elle n’ouvrira pas les portes d’Auschwitz, ni celles de
Treblinka.
Ce monde est injuste, mais le Seigneur, lui,
est juste. Il punit l’ingratitude en défaisant ses actes pour
lesquels nous aurions dû Lui être reconnaissants.
Fais quelque-chose de mal aujourd’hui, et le
passé deviendra futur et viendra te frapper en retour. Affame
les Gaziotes, et ton grand-père mourra de soif et de faim.
Torture les Palestiniens : tes ancêtres seront torturés par
l’inquisition, qui utilisera le même raisonnement que celui que
tu as appliqué, aujourd’hui même, à tes ennemis. Fais d’Hébron
une prison pour ses habitants, et les juifs y seront massacrés
en 1929. Le crime commis par les juifs en maltraitant les
Palestiniens est d’ores et déjà puni, aujourd’hui même. Ne
demande pas qui on affame, ni qui on torture : c’est quelqu’un
qui t’est extrêmement proche.
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Breakout from Ghetto Gaza
By Israel Shamir
26.01.2008
They went out, risked their lives, rushed the
army, overturned the fence, strode the barbed wire, wiped out
the border between two states, committed so many heroic acts,
worthy of great warriors, suffering casualties -- and when they
were through, they went to shop and bought bread for their
children. This gave a lie to the image of Palestinians that the
Jews had tried to plant in world conscience: that of wild
violent fanatics bent on rampage. Instead, the guys broke out of
jail and bought bread. Meaning, they were kept hungry by their
Jewish overlords. A stronger picture will not come soon from the
Middle East than that of these family men carrying bread back
home.
They are so normal, these Gaza, like you and me
– they carry out their normal lives, they work in a bank or a
garage -- but they get full medieval treatment. First, they were
dispossessed and corralled into Gaza, then they were treated
like even dogs should not be treated; they were not allowed to
travel by a highway if the road is used by a Jew, they were not
permitted to see their immediate family living only a mile away.
And then, this siege. No food, nothing to feed the children
with. No future, either, with Israel as the neighbour. They
suffer for only one crime: they are not Jews, though,
ironically, many of them are descendent of Jews, some with
famous Jewish family names, who embraced Christ or the Prophet.
They were supposed to suffer quietly, but the
Gazans have a lot of dignity. They voted for Hamas against the
will of Israel and America, and they expelled the
collaborationist gang of Dahlan. Now, they have rushed the
fence, and that was a good example for all of us: nothing can be
done within the legal limits our enemies had enforced. There is
a need for the push that is called Revolution.
When the brave Gazans walked back, loaded with
their lucky catch, with bread and rice, with salt and blankets,
with vegetables and lambs, the Jews were decidedly unhappy. The
natives will forget that we are like God unto them; we provide
and we punish, we feed and we starve. Instead of accepting our
doom, they took their fate in their hands. With bread and rice,
the Gazans will smuggle guns, and this may force us to postpone
the big offensive already agreed upon with George W. The Jews
prefer to assail weapon-less victims.
The Egyptians also failed Jewish expectations.
“I believe Egypt knows what its job is”, said the arrogant
Israeli general Ehud Barak. The job he gave to Egypt is the job
of jailer of their Palestinian brothers. “The Gazans would never
dare to break the siege to Sinai, - wrote Israeli pundits a
week, even a day ago - Egyptians will meet them with deadly
fire.” When there was a shoot-out, the Israelis were so happy
for a while. Effi Eitam, a right-wing religious Jewish leader,
who looks like a ‘well-fed kosher pig in yarmulke’(in words of
Gilad Atzmon) wrote in the Yediot Ahronot an op-ed dripping of
crocodile tears. We Jews are so soft and merciful in comparison
to the Egyptians, he wrote. But Mubarak wants to survive, and he
knows there are limits he may not push too far. He gave orders
to his soldiers to cease fire. The Jews wailed that Egyptians
must enforce the border, and supply their pound of flesh per
agreement. In vain. Mubarak does not want to follow Anwar
as-Sadat to hell.
Deeply dissatisfied, the Jews watched this
stream of people that got out of their jail for a short break.
But then, they are hard to please, these Jews are. The
Palestinians have to kill each other in a civil war, or die of
hunger to please the Jews.
My grandfather did that, he died of hunger and
exhaustion in 1942 in the ghetto of Stanislaw. The Germans and
their Ukrainian quislings did to Jews what the Jews did to
Gazans: they gathered them in the ghetto, and left them to
starve there. The slogans of the Nazis were also taken from
Homerton-Barak’s book, mutatis mutandis: “they must suffer
because their leaders are our enemies, they should be punished
for their terrorism in the revolution, let them go hungry
because their brothers harass the German troops and bomb German
cities”. My grandfather Israel – I was named after him –
succumbed to hunger, cold and exhaustion, they did not even have
to shoot him; he did not qualify for their targeted killing
program.
Wait, you’ll say, how could Barak and Olmert
starving Gazans in 2008 influence the Germans of 1942? How could
they be responsible for death of my granddad? The answer is
given in the secret language of Jewish mysticism: Ein mukdam,
ein meuhar beTorah. The sequence of events - in the Holy Writ
and in the world – is irrelevant, because all events and their
alleged consequences take place in the same hyper-time, forever
playing vicious circles of Cat-pursuing-Mice-that
scared-Elephant-that trampled-the-Cat. Poincare and Einstein
translated this concept into the language of modern physics when
they described Time as just one of dimensions as bendable as the
others.
Douglas Adams popularised this in his novel: his
characters go back in time to fix a problem, they do it, but at
some cost: they save a fish, but dodo dies out, they gain music
of Bach, but lost Coleridge’s poems. The people are not aware
that the world already changed; that now they have more of Bach
but less of Coleridge. Only those, who could exit the time frame,
know: the world is changing all the time because of our deeds,
and these changes go “back” and “forth”, because there is no
such thing as “back” and “forth”. Thus, the Armenians
slaughtered and expelled the Azeris, and their ancestors were
deported into desert to suffer in the Kurds’ hands, and the
Kurds suffer for this crime, and for their support of the
US-Zionist occupation.
And some things have not materialised yet, but
they will: when I listen to the Jews (and Poles, and Ukrainians,
and Americans) who insist that “Stalin was as bad as Hitler” and
“there is no difference between Nazis and Commies” and of
“Russian antisemitism”, I know that in the next future, the Red
Army will not fight the Germans, will not liberate Poland and
Czechia, will not open the gates of Auschwitz and Treblinka.
This world is just, and the Lord is just. He
punishes ingratitude by undoing the deed one had to be grateful
for.
Do an evil thing today, and the past will change
and kick you back. Starve the Gazans and your grandfathers will
die of thirst and hunger. Torture Palestinians, and your
ancestors will be tortured by the inquisition using the same
reasoning you applied today to your enemies. Turn Hebron into a
prison for its inhabitants, and the Jews will be slaughtered in
1929. The crime of Jewish mistreatment of Palestinians is being
punished even now. Do not ask who is starved and who is tortured:
it is somebody quite close to you.